À l'occasion de la fête nationale, Éléphant vous propose une sélection de longs métrages restaurés qui abordent d'une façon ou d'une autre les enjeux liés à notre histoire, à notre identité et à nos aspirations. Que ce soit par le biais de l'humour, du drame, de la poésie ou de l'histoire, ces films portent en eux des réflexions inspirantes sur le Québec.
Nous les avons classés par décennies afin de voir en un coup d’œil toute la diversité des œuvres proposées à travers les époques.
Bonne Saint-Jean-Baptiste à toutes et à tous!
Années 1940 et 1950
Le gros Bill (Jean-Yves Bigras et René Delacroix, 1949)
Bill Fortin, un Américain du Texas, revient vivre au Québec lorsqu’il hérite de la ferme de son oncle dans une petite communauté paroissiale. D’abord apprécié de tous, il connaît quelques problèmes liés à une rivalité amoureuse qui connaîtra un heureux dénouement. Le film contient de rares scènes de drave de grande qualité et offre un portrait idéal du milieu rural traditionnel.
Un homme et son péché (Paul Gury, 1949)
Alexis est amoureux de Donalda et se promet de l’épouser à son retour des chantiers, mais Séraphin, un usurier avare et manipulateur, contrecarre ses plans. Il épouse la jeune femme et réussit à s’emparer de la terre d’Alexis après lui avoir prêté de l’argent que ce dernier a perdu au jeu et est incapable de rembourser. Première adaptation au cinéma du célèbre roman de Claude-Henri Grignon, Un homme et son péché qui dépeint les Laurentides à l’époque de la colonisation. Le film a connu un succès énorme à sa sortie.
Les brûlés (Bernard Devlin, 1959)
Ce film évoque la crise économique qui a affligé l'Amérique du Nord, en 1930, et qui a eu des effets dévastateurs sur la population de la province de Québec: les épreuves, les difficultés et le dur labeur des colons de l'Abitibi. Aux prises avec une terre inhospitalière, des luttes de pouvoir, de nombreux dangers, la peur constante de manquer de l'essentiel pour vivre, les colons devront rester solidaires afin d'assurer la survie de leur village.
Années 1960
Pour la suite du monde (Pierre Perrault et Michel Brault, 1963)
Chef-d'oeuvre du cinéma direct, Pour la suite du monde a été tourné à l’Île-aux-Coudres et nous montre comment des jeunes gens s’associent avec la vieille génération de pêcheurs pour recréer la pêche aux marsouins, une coutume ancestrale caractéristique de l’île. Photographié avec une extrême sensibilité aux choses et aux gens, ce film révèle la poésie de la langue quotidienne et l'esprit mythique des gens de la mer, attachés à leurs traditions et influencés par la lune et les marées.
Jusqu’au cou (Denis Héroux, 1964)
Le récit de l’aventure d’un jeune universitaire qui fait face à l’amour et au mouvement séparatiste québécois au début des années 60. Un film issu de la Révolution tranquille et produit par l’association générale des étudiants de l’Université de Montréal qui contient de nombreuses scènes montrant les milieux indépendantistes de l’époque.
Trouble-fête (Pierre Patry, 1964)
Face à des éducateurs obtus et des valeurs traditionnelles qui ne le rejoignent pas, un étudiant d'un collège classique veut transformer son milieu. Il se révolte, affronte directement les autorités et organise des activités qui doivent changer les choses. Il finit par être renvoyé de son collège et se retrouve dans le pétrin. Un film charnière qui témoigne des nouvelles préoccupations des cinéastes envers la transformation de la société québécoise.
C’est pas la faute à Jacques Cartier (Georges Dufaux et Clément Perron, 1968)
Ce film nous emporte dans un tour du Québec peu banal en compagnie de trois touristes américains. Un guide, hautement fantaisiste, mène le bal dans une atmosphère de santé et de bonne humeur. Des incidents baroques, des drôleries, quelques scènes amoureuses, des sarabandes comiques se bousculent dans cette comédie où l'actualité joue un rôle de premier plan. Satire sur nous-mêmes et notre société, ce film n'a qu'une ambition: donner la lune aux Québécois dans un monumental éclat de rire.
Où êtes-vous donc? (Gilles Groulx, 1969)
Deux gars de la Côte-Nord descendent à Montréal où ils rencontrent une jeune fille délaissée. Trois personnages symboliques qui extériorisent trois choix devant lesquels les Québécois sont placés. Ce film protestataire suit le cheminement des Québécois dans leur vie quotidienne, capte leurs aspirations, saisit leurs problèmes et soumet à leur observation l'image de leur condition. Un langage cinématographique choc a été utilisé par l'auteur : sous-titres et intertitres, citations, voix hors champ et chansons, références publicitaires, récitatif à la mode monacale et toute la gamme de sons et de bruits qui assourdit le Québec et la terre entière!
Années 1970
Le grand film ordinaire (Roger Frappier, 1971)
Le grand film ordinaire met en vedette Le Grand Cirque ordinaire, une compagnie de théâtre fondée à Montréal en 1969 dans la tradition du vaudeville et de la commedia dell'arte. Le film se voulait d'abord un documentaire sur ce groupe théâtral, mais s'est muté en une sorte d'extension de la pièce originale T'es pas tannée, Jeanne d'Arc?
Tiens-toi bien après les oreilles à papa (Jean Bissonnette, 1971)
Les tribulations de deux Québécois nationalistes dans l'univers anglophone des compagnies d'assurance. Une satire qui puise son ironie dans une situation sociale bien précise. Un exemple fort représentatif des comédies populaires de l'époque qui prenaient appui sur la télévision et les vedettes à la mode, et qui ont fondé un certain courant commercial du cinéma québécois, plus intéressant que celui du «film de fesses».
Bingo (Jean-Claude Lord, 1974)
Très librement inspiré des événements d'Octobre 1970, ce long métrage raconte une histoire d'amour entre deux collégiens : Geneviève et François. À l'occasion d'une grève violente dans l'usine où son père est ouvrier, François se politise et fait la connaissance d'un petit groupe d'activistes. Le jeune étudiant devient rapidement un terroriste sans se rendre compte qu'il est manipulé. Bingo a été l'un des plus gros succès commerciaux du cinéma québécois.
Les ordres (Michel Brault, 1974)
À mi-chemin de la fiction et du documentaire, Les ordres est basé sur le témoignage d'une cinquantaine de personnes emprisonnées à la suite de l'adoption des Mesures de guerre en octobre 1970. Nous suivons cinq personnages (trois hommes et deux femmes) construits à partir de ces témoignages, de leur arrestation à leur libération. Prix de la mise en scène au Festival de Cannes en 1975.
Le son des Français d’Amérique (André Gladu et Michel Brault, 1974-1980)
Le son des Français d'Amérique documente en 27 épisodes le patrimoine musical et chanté des francophones d'Amérique en partant sur les traces des derniers représentants francophones du continent issus d'une tradition orale en voie de disparition. De nombreux épisodes ont été tournés au Québec et en Acadie, mais aussi dans d'autres provinces canadiennes, en Louisiane, dans le reste des États-Unis et en Europe. Une incursion fascinante dans les traditions musicales nord-américaines issues de nos ancêtres.
Années 1980
Les Plouffe (Gilles Carle, 1981)
Chronique d'une famille de Québec bouleversée par la crise économique et la guerre, qui transformèrent radicalement la province dans les années 1930 et 1940. Le prix L.-E.-Ouimet a été accordé au film en 1982 pour trois raisons: «l'envergure même du défi que représentait l'adaptation à l'écran du roman de Lemelin,la qualité et la beauté des images de Protat,la mise en scène et la façon magistrale avec laquelle Carle a dirigé ses comédiens.»
Elvis Gratton, le King des Kings (Pierre Falardeau et Julien Poulin, 1985)
Propriétaire d'un garage et habitant la banlieue, Bob Gratton ne se réalise pleinement que lorsqu'il prend les traits et les habits du «King», Elvis Presley. «Critique virulente du récit essentialiste fédéraliste et de la pensée conservatrice de droite, ce film interroge la condition identitaire québécoise et prévient des dangers de l'oubli de soi dans la volonté de devenir semblable à l'Autre et de refuser la multiplicité des appartenances.» (Christian Poirier)
Tinamer (Jean-Guy Noël, 1987)
Tinamer a 27 ans lorsque sa mère meurt. Les funérailles de cette dernière lui font revivre certains événements de sa prime enfance qui l'ont marquée pour toujours : le monde merveilleux dans lequel son père la faisait rêver s'est effondré le jour où la réalité lui est apparue. Adaptation du livre de Jacques Ferron, L'Amélanchier.
Les tisserands du pouvoir 1 (Claude Fournier, 1988)
À Woonsocket, Rhode-Island, Jean-Baptiste Lambert se souvient de l'exode de 600 000 Canadiens français partis gagner leur vie en Nouvelle-Angleterre au début du siècle. Plus précisément, il revit les mésaventures de son père et lui alors qu’ils travaillaient dans une usine de textile exploitée par les Roussel, une famille française.
Les tisserands du pouvoir 2 : la révolte (Claude Fournier, 1988)
Assiégé par la police alors qu’il est réfugié dans des ateliers désaffectés où il a travaillé, Jean-Baptiste Lambert se souvient de la saga et des luttes des 600 000 émigrés canadiens-français devenus autant d'Américains. On revoit à travers ses yeux les principales manifestations et révoltes des ouvriers originaires du Québec contre leurs patrons français et les jeux de pouvoir à l’œuvre, tant du côté patronal que religieux.
Années 1990
Nelligan (Robert Favreau, 1991)
Dans le Montréal de la fin du XIXe siècle, le jeune Émile Nelligan se voue entièrement à la poésie et doit faire face à l’incompréhension de son entourage. Entretenant une relation trouble avec sa mère surprotectrice et étant en conflit ouvert avec son père, il bénéficie de l’aide du Père Seers, un imprimeur érudit, mais ses fréquentations et ses excès le conduiront bientôt aux portes de l’asile où il sera interné jusqu’à sa mort.
Le temps des bouffons (Pierre Falardeau, 1993, court métrage)
En introduction, le réalisateur propose un court extrait d'un film tourné par Jean Rouch au Ghana en 1957. Ce document décrivait une fête annuelle au cours de laquelle les Africains s'habillaient comme leurs colonisateurs britanniques. Suit un reportage tourné, en 1985, lors du banquet annuel du Beaver Club à l'hôtel Reine Elizabeth de Montréal. Cette fête, marquant les 200 ans de l'organisme, regroupait l'élite politique et économique canadienne. Les commentaires du réalisateur présentent ces deux événements comme une manifestation de colonialisme. (ChoixMédia)
Octobre (Pierre Falardeau, 1994)
Inspiré par le témoignage de Francis Simard, l'un des membres de la cellule du FLQ qui enleva Pierre Laporte, Octobre raconte, jour après jour, le plus tristement célèbre kidnapping politique de l'histoire du Québec qui se termina lorsque la police retrouva le corps de l'otage dans le coffre arrière de la voiture ayant servi à l'enlèvement. «Nécessaire et injustifiable», cette phrase de Camus ouvre ce huis clos tragique entre quatre jeunes felquistes et un ministre devenu otage.
Quand je serai parti… vous vivrez encore (Michel Brault, 1999)
Exilé depuis un an aux États-Unis après l’échec de l’insurrection des patriotes, François-Xavier Bouchard revient au Canada pendant l’automne 1838, en plein cœur du conflit entre les habitants français du Bas-Canada et les occupants anglais. Il reprend la lutte et est rapidement capturé avec plusieurs de ses compatriotes. Jugés par un tribunal militaire, 12 patriotes, dont le Chevalier de Lorimier, sont pendus devant la porte de la prison, sous les yeux horrifiés de leurs compagnons. Pendant plusieurs mois, des dizaines d'autres patriotes, eux aussi condamnés à mort, attendent dans l'angoisse une exécution qui ne viendra jamais. Le film est inspiré des journaux authentiques de ceux qui vécurent ces événements.
Années 2000
Les fantômes des 3 Madeleine (Guylaine Dionne, 2000)
Une mère, sa fille et sa petite-fille, toutes prénommées Madeleine, partent ensemble pour la Gaspésie. Durant le voyage, elles apprennent à mieux se connaître et à faire la paix avec les fantômes du passé. Un road movie superbement photographié en noir et blanc qui dresse de façon poétique le portrait de trois femmes de différentes générations.
15 février 1839 (Pierre Falardeau, 2001)
Au lendemain de l'insurrection des patriotes québécois en 1837, huit cents d'entre eux sont enfermés à la prison de Montréal. Parmi ceux-ci, une centaine de condamnés à mort. Au petit matin du 14 février 1839, Marie-Thomas Delorimier et Charles Hindelang ainsi que trois de leurs compagnons apprennent qu'ils seront pendus le lendemain.
Le film raconte les dernières vingt-quatre heures des deux hommes.