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La maudite galette célèbre ses 50 ans à la Cinémathèque québécoise

Publié le 22 août 2022
Éléphant - René Caron, J.-Léo Gagnon et Luce Guilbeault dans une scène de La maudite galette, présenté le 5 septembre à la Cinémathèque québécoise pour souligner les 50 ans du film.
Le 7 septembre marquera le 50e anniversaire de la sortie du premier long métrage de fiction réalisé par Denys Arcand, La maudite galette. Pour marquer le coup, une nouvelle restauration du film sera présentée à la Cinémathèque québécoise le 5 septembre à 18h30 en présence de Denys Arcand et de Marcel Sabourin.

Même s'il avait déjà un peu touché au cinéma de fiction avec Seul ou avec d'autres (long métrage étudiant coréalisé en 1962 avec Denis Héroux et Stéphane Venne), c'est en 1972 que Denys Arcand arrivait véritablement au cinéma de fiction après s'être colletaillé au documentaire au sein de l'ONF pendant 8 ans. À l'époque il terminait Québec : Duplessis et après..., et son film précédent, On est au coton, était toujours interdit de diffusion par le commissaire de l'ONF Sydney Newman. 

En 1969, Denys Arcand demande à l'écrivain Jacques Benoit d'écrire un scénario à partir de la légende de La chasse-galerie. Peu convaincu par un scénario «assez mal construit» de l'aveu même de Benoit, Arcand rejette le projet et le scénariste lui propose alors l'idée de La maudite galette : Un couple de la classe populaire décide de commettre un vol chez un vieil oncle riche. Ils sont suivis à leur insu par leur pensionnaire, le vol tourne mal et ce dernier s'enfuit avec le magot. Après s'être acheté une fille et une grosse voiture américaine, il sera à son tour l'objet d'une traque qui finira mal. 

Le premier film de fiction de Denys Arcand sera donc un film de genre avec guns et fusils, un film de petit banditisme campé dans les milieux populaires montréalais. «Notre objectif en faisant ce film était donc de présenter une anecdote en apparence conventionnelle, qui satisfasse en apparence aux normes du cinéma commercial, et de subvertir ces apparences à l'aide de la mise en scène, de la photographie, de l'enregistrement du son, du jeu des comédiens, des décors, etc. Nous voulions pour ainsi dire faire un film faux et vrai. Vrai dans chacun de ses détails, mais en même temps faux dans son ensemble à cause de la distance que nous avons voulu prendre par rapport aux normes du cinéma conventionnel. Nous espérions que cette dichotomie produirait chez le spectateur un malaise (...). C'est dire que nous espérions faire un film insidieusement subversif (...).»

Le film, d'abord présenté au mois de mai à la Semaine de la critique au Festival de Cannes, sort le 7 septembre 1972 au Saint-Denis sous les éloges de la critique. Ces derniers soulignent l'aspect distancié de la mise en scène minimaliste (toute en plans fixes) de ce film noir à la québécoise, la justesse du portrait social, la qualité des interprètes, l'absence d'opposition morale entre les classes sociales, l'humour cynique. 

Parmi le concert d'éloges, on retient la voix de Robert Lévesque, alors directeur des pages culturelles de Québec-Presse, qui résume bien l'enthousiasme avec lequel le film a été accueilli et l'importance qu'on y voyait : «Comme Michel Tremblay et André Brassard avaient bouleversé le théâtre québécois, en 1969, en présentant au Rideau-Vert Les belles-soeurs, Denys Arcand et le scénariste Jacques Benoit bouleversent le cinéma québécois avec leur «Galette». Dans leurs domaines respectifs, ces deux événements sont d'égale importance. Dans la démarche générale de la culture québécoise, ils sont ces jalons qui se suivent. À quatre ans d'intervalle. Donc, dans La maudite galette, il y a beaucoup de choses neuves. Les principales sont le milieu social sur lequel le regard du cinéma québécois se pose pour la première fois, et le ton qu'a adopté le cinéaste pour parler de ce milieu.»

Pourquoi ce choc initial provoqué par le film, le jalon qu'il représentait dans l'histoire du cinéma québécois selon Lévesque, a-t-il été occulté?  Sans aucun doute s'explique-t-il en grande partie par l'accumulation de grands films réalisés par Arcand, de telle sorte qu'on a oublié à quel point La maudite galette est une oeuvre majeure de notre cinéma. Peut-être aussi que l'aura et l'impact du cinéma direct sur notre vision des premières décennies du cinéma québécois nous a-t-il fait oublier l'importance d'un film de genre au travers d'une cinématographie qui se conjuguait bien davantage avec le cinéma du réel qu'avec le cinéma de genre? 

Découvrir ou redécouvrir La maudite galette en 2022, c'est s'exposer à un choc et à un plaisir cinématographique sans nul autre pareil, mais c'est également l'occasion de jauger la richesse et la diversité du cinéma de Denys Arcand, tout en constatant l'acuité du regard sur la société québécoise dont il fait preuve depuis 50 ans.  

C'est enfin le plaisir de voir à l'oeuvre d'excellents interprètes: Luce Guilbeault, Marcel Sabourin, René Caron, J.-Léo Gagnon, Maurice Gauvin, Gabriel Arcand, Jean-Pierre Saulnier, Julien Lippé, Hélène Loiselle.

La nouvelle restauration de La maudite galette a été réalisée à partir du négatif original 35mm et du son magnétique 35mm. 




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